Alors que les taux d’intérêt augmentent, aujourd’hui l’homme qui est devenu une légende pour ses anticipations de quantitative Easing(Planche à billets), sur les fluctuations des devises et d’autres événements mondiaux majeurs vient d’avertir kingworldnews, de l’exubérance irrationnelle des marchés US et des primes payées par les raffineurs suisses pour acheter de l’or physique du fait de pénuries rencontrées.

Egon von Greyerz: En cette fin d’année, c’est l’euphorie sur les marchés. Les investisseurs sont déterminés à faire grimper le Dow Jones jusqu’à 20.000 points. Etant donné qu’il ne reste plus que 160 points à prendre, les atteindre ne sera sans doute pas très difficile. Parallèlement, les obligations d’Etat américaines s’effondrent. Le rendement à 10 ans est passé de 1,4% il y a 6 mois environ, à 2,6% aujourd’hui. Normalement les investisseurs boursiers s’inquiètent de taux d’intérêt plus élevés , mais le marché est actuellement euphorique et dans l’allégresse ambiante, les mauvaises nouvelles sont totalement ignorées…

Les gens ont la mémoire courte car il y a quelques semaines, tout le monde prévoyait un désastre sur les marchés actions et dans le monde si Donald Trump venait à rempoter l’élection présidentielle américaine, mais maintenant, c’est comme si cette victoire était devenue une bénédiction. Un marché qui a été multiplié par 3 depuis Mars 2009 ne préoccupe manifestement plus personne. Même le PER de Shiller (prix nobel d’économie) qui valorise maintenant plus de 27 fois les bénéfices des sociétés, et qui se situe 56% au dessus de sa valeur moyenne – est totalement ignoré par ce marché exubérant.

En outre, le marché a intégré le fait que Donald Trump augmentera la dette publique américaine de plus de 10.000 milliards de dollars, au cours des prochaines années, soit 50% de plus que son niveau actuel. La hausse des dépenses et la baisse des impôts semblent être les parfaits ingrédients à la montée des marchés boursiers.

Modèle financier parfait ou prélude à un effondrement ?

Dans mes récents articles, j’ai évoqué le problème des rendements obligataires dont le long cycle baissier de 35 ans vient de toucher à sa fin. Du coup, des taux d’intérêt plus élevés conduisent à des déficits plus élevés ainsi qu’à des emprunts encore plus élevés. Ainsi, toutes les conditions sont réunies pour assister à l’effondrement du château de cartes. Nous reverrons bientôt des taux aussi élevés que dans les années 1970 et 1980, comme nous l’avions vu dans de nombreux pays ainsi qu’aux Etats-unis. Cela signifie que la plupart des gens seront dans l’incapacité de rembourser leur crédit immobilier, automobile, ainsi que ce qu’ils ont emprunté via leurs cartes de crédit. Et aucun gouvernement ne peut s’acquitter des intérêts d’une dette qui flambe. Mais ce ne sera pas un problème, car ils n’auront qu’à imprimer plus d’argent afin de couvrir les intérêts. Apparemment, ce modèle financier est la panacée et semble pouvoir durer indéfiniment. Cependant, les conséquences sont claires – l’effondrement des devises ainsi que l’inflation conduiront à l’hyperinflation.

Mais l’euphorie actuelle sur les marchés boursiers américains pourrait être de courte durée. Le problème ne s’arrête pas qu’aux seuls indices surévalués, les indicateurs techniques eux-mêmes indiquent également que nous assisterons bientôt à un important repli.

Les indices viennent d’atteindre un niveau jamais observé depuis les bulles de 1929, 2000 et 2007

Indices: la bulle spéculative ne cesse de gonfler. Les marchés sont totalement déconnectés des réalités économiques

Si nous observons tous les autres marchés sur la planète, aucun d’entre eux ne confirme ni ne valide ce qui se passe aux États-Unis. Nous ne devons pas oublier que l’Amérique n’est pas une économie isolée. Or, elle semble être totalement déconnectée de ce qui se passe dans le reste du monde. Mais cette époque où la plus grande économie au monde pouvait évoluer à contre courant des autres est terminée. Il peut y avoir un léger décalage dans le temps, mais à la fin, toutes les économies finissent par converger dans le même sens.

Performance des principaux marchés boursiers mondiaux

Etats-Unis: 69% plus élevé que son sommet atteint en 1999

Canada: à ses sommets de 2008 et 2014

Royaume-Uni: au niveau où il était 17 ans plus tôt 

Allemagne: 11% sous son sommet atteint en 2015

Japon:  51% sous son sommet atteint en 1989

Chine: 47% sous son sommet atteint en 2007

Hong Kong: 30% sous son sommet atteint en 2007

France: 32% sous son sommet atteint en 2000

Hollande: 33% sous son sommet atteint en 2007

Espagne: 44% sous son sommet atteint en 2007 

Italie: 60% sous son sommet atteint en 2007

L’écart que nous observons actuellement entre le marché boursier américain et les autres importantes places boursières mondiales est un énorme signal d’alerte. Le marché américain est surévalué et évolue sur du temps emprunté. Le marché américain est susceptible de plonger d’au moins 75% au cours des prochaines années voire probablement de 90% comme entre 1929 et 1932. Les risques sont bien plus élevés aujourd’hui aux Etats-Unis et sur le reste de la planète qu’ils ne l’étaient dans les années 30.

Si les indices boursiers américains plongeaient de 90%, cela correspondrait à une chute d’au mois 95% par rapport à l’Or voire sans doute plus. Quasiment aucun investisseur n’anticipe ce scénario aujourd’hui, et c’est la raison pour laquelle le choc sera extrêmement violent dans le monde entier et créera une ruée historique vers l’Or physique. A ce moment là, il deviendra extrêmement difficile de trouver de l’Or par les canaux officiels et ce peu importe ce que l’acheteur sera prêt à payer.

Les problèmes se profilent en Suisse

Si vous regardez l’ensemble des risques dans le monde et tous les nuages noirs qui s’accumulent au dessus de nos têtes, la Banque nationale suisse (BNS) n’est pas en reste. Dans le cadre du référendum suisse sur l’or il y a deux ans, j’avais prévu que la Banque nationale suisse ne serait pas en mesure de maintenir le cours plancher d’1 euro pour 1,2 franc suisse. Avant le référendum, la BNS avait déclaré que ce serait une catastrophe pour la Suisse si ce cours plancher venait à céder. Comme toutes les banques centrales, la BNS a menti à son peuple puisqu’elle avait fini par supprimer le cours plancher six semaines plus tard, ce qui coûta des dizaines de milliards de francs suisses.

La BNS, comme le système bancaire suisse, étaient considérés comme des plus sûrs. Mais malheureusement, tout ça c’est du passé. Les banques suisses sont en train de prendre les mêmes inacceptables risques que toutes les banques internationales avec un énorme effet de levier et d’importantes positions hors bilan sur les dérivées. La BNS n’est plus vraiment une banque centrale. Au lieu de cela, elle est devenue le plus important gérant de fonds au monde. Leur bilan, au 30 septembre 2016, est de 720 milliards de francs, soit 10% de plus que le PIB suisse. C’est également 80 milliards de francs suisse de plus qu’au 31 décembre 2015. A titre de comparaison, le bilan de la Fed, qui est bien plus important, ne représente « seulement » que 22% du PIB américain. Mais il n’y a pas que la taille du bilan de la BNS qui est préoccupant, il y a aussi ce qui le constitue. Environ 75% du bilan est lié à la spéculation des devises. La majeure partie est en euros et un peu en dollars. 100 millions de francs suisse sont investis en actions, principalement américaines. Du coup, un problème dans la zone euro, conjuguée à une baisse de l’euro et à un effondrement du marché boursier américain mettrait la BNS en situation de faillite. Mais comme toutes les banques centrales, elle résoudra ce problème de façon élégante. Il lui suffira d’imprimer tout simplement des milliards de francs suisses supplémentaires. La conséquence de cela, ce sera une course sans fin à la dépréciation du franc Suisse.

La Suisse sera-t-elle le prochain Chypre ?

Mais ce n’est pas juste la BNS qui est un énorme problème. Le système bancaire suisse est beaucoup trop important puisque sa taille représente 5 fois le PIB suisse. C’est beaucoup plus important que n’importe quelle autre grande économique et cela ressemble à Chypre lorsque son système bancaire s’était effondré. Et si on ajoute à cela, le total des produits dérivés du système bancaire suisse, soit 25.000 milliards de francs suisses, cela équivaut à 38 fois le Pib suisse, ce qui est tout simplement hallucinant. Je ne dis pas que la Suisse est pire que tous les autres pays. D’ailleurs, l’économie suisse est mieux gérée que la plupart des nations. En outre, c’est l’une des plus anciennes démocraties au monde, avec de fortes traditions, c’est un état de droit avec un excellent système politique et la Suisse est probablement l’un des pays les plus sûrs au monde. Mais personne ne devrait croire le système bancaire suisse ainsi que sa monnaie sont plus supérieurs à ceux d’autres pays.

Les Suisses font de moins en moins confiance au secteur bancaire

Crédit Suisse: le bénéfice net chute de 95% au 3^ème trimestre

C’est d’ailleurs une autre raison pour laquelle je ne recommanderais à personne de détenir un quelconque actif, y compris de l’Or, dans une banque n’importe où dans le monde. Mais du fait que nous ayons le meilleur système politique au monde et de fortes traditions en termes d’exploitation et de raffinage d’Or, la Suisse est le pays le plus sûr pays au monde pour y stocker des métaux précieux dans la mesure où ils sont détenus en dehors du système bancaire.

La partie émergée de l’iceberg

Concernant l’Or et l’Argent, les cours ont baissé après que la Fed ait décidé de remonter ses taux. Mais le mouvement auquel on a assisté ces derniers jours est surtout lié à la hausse du dollar américain. Or dans la plupart des autres devises, le cours de l’Or n’a pas beaucoup bougé depuis la réunion de la Fed. Comme d’habitude, nous avons assisté à une énorme manipulation. D’ailleurs le récent cas de la Deutsche Bank va dans ce sens puisqu’elle paiera 60 millions de dollars pour régler les accusations de manipulation de l’or, ce qui est ridicule face aux dommages qu’elle a causé aux acteurs de ce marché. Ensuite, nous verrons sans doute beaucoup d’autres banques être attaquées, comme Barclays, HSBC, UBS etc… La Deutsche Bank n’est que la partie émergée de l’iceberg et les enregistrements des conversations de traders sont des éléments tendant à montrer qu’il y a une manipulation régulière et importante des métaux précieux comme nous l’avons toujours su. Tout ceci aura d’importantes répercussions sur les marchés de l’or et de l’argent papier.

Les raffineurs suisses prouvent l’importante manipulation du marché de l’Or

Nous avons écouté les raffineurs suisses au cours des dernières semaines, et à un certain moment ils ont dû payer des primes pour acheter de l’Or en raison de pénuries. Donc, personne ne devrait croire que les marchés de l’or et de l’argent papier sont corrélés à l’or et à l’argent physique. Nous nous approchons de l’instant de vérité qui va impacter ce marché et je ne voudrais pas être la personne qui détiendra de l’or ou bien de l’argent papier à ce moment-là. »

Source: kingworldnews – Voir les précédentes interventions d’Egon Von Greyerz

               

         Nicolas Perrin: Investir sur le marché de l’or                                           Histoire de l’argent

               

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